Une tragédie nationale en 3 actes
Gwa I Un destin présidentiel par la force
1999. Le pays se délite. L’île de Ndzuani a rompu unilatéralement avec la Fédération comorienne en 1997 sous la houlette du Colonel Abeid. À Ngazidja, l’hostilité envers les Anjouanais, dont on dit qu’elle a été savamment entretenue par le Chef d’État-Major de l’armée le Colonel Azali Assoumani, est à son paroxysme. C’est dans ce contexte qu’il renverse le président par intérim Tadjiddine Ben Saïd Massonde. Colonel Azali déclare alors vouloir « empêcher le pays de sombrer dans le chaos et l’anarchie ». Il qualifiera son putsch de “force d’interposition”. Il dissout la Constitution et ses institutions.
Le coup d’État durera 3 ans. 3 années de conflits entre le pouvoir central à Moroni aux mains des militaires tandis que Ndzuani est laissée aux séparatistes. 3 années durant lesquelles il promet de rendre le pouvoir aux civils une fois la paix rétablie.
Pour éviter la mainmise d’une seule île sur l’ensemble des intérêts de la Nation, le pays s’accorde sur le principe d’une présidence tournante et d’une large autonomie de chaque île. Le pouvoir central sera désormais assumé, tour à tour, lors d’un mandat unique, par chaque île constituant l’Union des Comores, Mwali, Ngazidja et Ndzuani. Ce sera l’application dudit “Accord de Fomboni”.
2001. Un référendum vient instituer officiellement l’avènement de la présidence tournante. Le 1er tour échoit à Ngazidja et Colonel Azali, devenu entre-temps Azali Assoumani, troque son treillis pour un costume et se présente au suffrage. Il a pris goût au pouvoir et la tentation est grande de s’y attarder oubliant sa promesse de céder sa place. D’autant qu’il a une revanche à prendre : l’ex-Colonel s’est fait connaître des Comoriens pour la première fois en 1995. Le pays frappé par un coup d’Etat de mercenaires dirigés par Bob Denard voyait un de ses plus haut gradés chercher refuge à l’Ambassade de France après avoir assuré à ses hommes “qu’il partait chercher du renfort”. C’est à l’époque, son plus haut fait d’arme avant le coup d’Etat qui l’imposera au pouvoir. 3 jours avant le fameux référendum de 2001 sur “la tournante”, le candidat-Colonel Azali aurait déjoué un coup de force à Mohéli. Beaucoup pourtant soupçonnent une mise en scène ayant pour seul but de redorer un blason de colonel terni par cette tenace réputation de pleutre. Il testait déjà là tous les éléments qui allaient lui permettre de triompher 18 ans plus tard.
La force, dont il n’hésite pas à faire usage.
Le bluff, déformer la réalité à son avantage.
La division, qui lui offre ainsi un boulevard pour se faufiler au pouvoir.
La ruse, ne croyant pas en la démocratie, il s’en sert pour parvenir à ses fins
Il s’impose grâce à ce cocktail détonnant et reste au pouvoir jusqu’en 2006.
2006. La présidence “tournante” échoit à Anjouan. Les premières élections réellement libres et transparentes se tiennent dans tout l’archipel sous l’égide de l’Union Africaine et de son armée. Le candidat soutenu par Azali s’inclinera face à Ahmed A. M Sambi, un nouveau visage de la politique comorienne, porteur d’espoirs et de rêves d’une population avide de changement après huit ans de règne azaliste.
Azali quittera le pouvoir, à contre-coeur, incapable de finir son discours en comorien à la tribune à cause des huées du public lors de la cérémonie de passation de pouvoir. Son discours a tourné court pourtant il n’avait pas dit son dernier mot.